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Village Tasga Commune de Tifra

Un ramadan sur fond d’apocalypse

Sidi Aïch
Un ramadan sur fond d’apocalypse

Brusque interruption des vacances d’été, départ massive des émigrés et autres Algérois, l’affluence s’éloigne, les rues se vident et la pression diminue subitement, c’est le sauve qui peu.

Mais si le feu n’est pas à la demeure ! Qui est donc à l’origine de ce branle-bas ? Eh bien ! La réponse est très simple, c’est qu’un invité de marque mais très encombrant tout de même, en cette période de l’année, partage désormais notre quotidien alors qu’un autre débarquera dans un prochain vol avant même le départ du premier. Le ramadan et la rentrée scolaire, le cauchemar des Algériens  et les purgatoires des porte-monnaies.

Au quatrième jour de ce mois sacré, les gens ont l’impression de se rapprocher davantage des flammes de l’enfer qu’ils essayent pourtant de fuir, en observant le jeûne.

Pour vérifier de visu, une visite chez l’épicier du coin ou au marché de la ville, si le mercure vous le permet bien sûr, car rares sont les journées où celui-ci daigne descendre du haut de ses quelque quarante degrés à l’ombre, ce qui handicape grandement les déplacements des citoyens sauf dans les cas de stricte nécessité.

Une fois arrivé à destination, c'est-à-dire chez l’épicier, les prix affichés achèvent la sale besogne. Une sueur froide envahit le moindre centimètre de votre corps et les vertiges vos emballent même ayant les pieds sur terre. Secouez-vous ou pincez-vous au besoin, mais vous ne rêvez pas, au contraire vous êtes devant la réalité et le fait accompli grandeur nature, sinon comment expliquer que les prix de la courgette, de la carotte, de la pomme de terre, les haricots ou les oignons pour ne citer que ces légumes, flirtent avec l’irrationnel. Pour les fruits, il ne faut surtout pas rêver ou disons, vous pouvez toujours rêver, car ils sont tout simplement hors de portée de la majorité qui constitue la classe moyenne. Même topo du côté du marché de Sidi Aïch où la viande rouge nargue les clients du haut des cimes des 800 DA le kilo et plus encore, et les 300 DA le kilo du poulet ont de beaux jours devant eux. Même le congelé qui, jadis faisait les yeux doux au consommateur lui tourne le dos à présent. Cela concerne bien sûr le seul chapitre des fruits, légumes et viandes, car les autres produits de base sont aussi chers depuis belle lurette.

Dans tout ce brouhaha, les acteurs, plutôt les arnaqueurs se renvoient la balle, les commerçants et autres détaillants parlent d’une flambée dans le marché de gros, alors que les grossistes que nous avons pu joindre disent qu’ils n’y sont pour rien.  Rencontré à la sortie du marché, Ami Ahmed, qui tient un couffin presque vide d’une main et son petit-fils de l’autre, jure par tous les saints qu’il n’a jamais vu cela depuis  sa tendre jeunesse. “C’est du vol caractérisé”, nous dira un autre jeune père de famille qui exerce dans l’enseignement, son ami et collègue ajoute :  “Que peut-on faire face à ces charognards qui nous guettent à tous les coins de rue, avec comme seule arme, un salaire de misère, versé de surcroît avec plusieurs jours de retard.”

Pour Salah, accompagné de sa femme et de ses deux enfants, c’est plutôt la rentrée scolaire qui le préoccupe : “J’ai fait plusieurs magasins et librairies à la recherche de la moindre marge dans les prix des fournitures scolaires. Même avec un double salaire étant donné que nous travaillons tous les deux, on arrive difficilement à subvenir aux besoins de nos enfants, alors que dire de ceux qui sont en chômage et Dieu sait qu’ils sont très nombreux.” 

Donc, chaleur torride, prix en feu et chômage galopant, une vraie misère qui prend toute sa dimension et toute sa démence. Cela n’est malheureusement qu’une petite image du sombre paysage, de la dure réalité d’un grande partie des Sidi      Aïchois aux premiers jours du mois sacré du ramadan et seulement à quelques jours de la rentrée scolaire. Car avec des prix qui échappent à toute logique, et une source intarissable de besoins en tous genres, les salaires des pauvres malheureux pères de familles, ne peuvent en aucun cas leur garantir une vie décente.

En tout cas, nos pauvres citoyens  qui ont les pieds en plein enfer ici bas, ont désormais comme seul espoir et réconfort, un regard vagabond très loin vers le paradis de l’au-delà, tant que le pouvoir d’achat des citoyens ce rétrécit inlassablement chaque jour davantage, telle une peau de chagrin et que nos épiceries et nos “souks” restent des musées, ou on peut juste contempler, admirer, peut-être même toucher, mais jamais acheter.

Arezki Toufouti

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